Postcolonialisme et rapport entre « race » et « éducation »
Depuis les années 1950, les études postcoloniales nous invitent à ne plus concevoir le « racisme » d’un point de vue ethnique[1], mais comme structurel et systémique, c’est-à-dire, un « racisme » qui se produit et reproduit au sein des institutions, notamment au sein des écoles. Comme le soulignait déjà Aimé Césaire dans son traité Discours sur le colonialisme (1955), dans la longue histoire de la colonisation, l’éducation a été instrumentalisée afin de définir la différence entre l’humain et le non-humain, le civilisé et le « sauvage », le savant et le non-savant. L’avancée coloniale est une domination qui repose sur le concept de civilisation, c’est-à-dire une idéologie qui justifie la domination d’une « race » au nom du progrès (Mbembe, et al., 2006). De nos jours, c’est cette vision du progrès que l’on retrouve dans les programmes scolaires, en particulier dans l’enseignement de l’histoire (Commission parlementaire, Rapport des experts 2021).
Pour ces raisons, les théories postcoloniales se sont intéressées à analyser le rapport entre l’éducation et la « racialisation »[2]. Elles illustrent comment, dans la longue histoire des sociétés occidentales et de celles colonisées, du XVIe au XXe siècle, les systèmes d’oppression raciale ont fait de l’école et de la question pédagogique un point nodal de leur programme de disciplinarisation et civilisation des opprimé·e·s. De même, les résistances antiracistes et anticoloniales se sont imbriquées dans l’histoire de l’école, et ont fait de l’accès à l’éducation une lutte pour la libération. Un exemple emblématique est celui de Milla Granson, née esclave en Virginie en 1816 (Curcio, 2019, p.27). Malgré l’interdiction de toute forme de scolarisation destinée aux esclaves, Granson apprit à lire et écrire grâce aux fils de son patron. Elle fonde ainsi une « école de minuit », où elle enseigne aux autres esclaves l’écriture et la lecture. Cette « école » a permis à plusieurs d’entre elleux de s’enfouir en falsifiant la signature du patron. Ainsi, l’école a toujours été au centre de sourdes batailles : d’une part, elle a reproduit des formes de racialisation et de colonialité,[3] d’autre part, elle a engendré des vives résistances. Conjointement aux études postcoloniales, le mouvement émergeant de la « Théorie Critique de la Race » fera de la relation entre pouvoir, droit, « race » et éducation, le terreau fertile de ses analyses.
Du postcolonialisme à la « Théorie Critique de la Race »
La Théorie Critique de la Race (TCR) [4] se développe à partir des années 1950-1960[5] aux Etats-Unis, en contestation du système judiciaire américain et de ses lois qui garantissaient une oppression sociale et économique des populations racisées dont les Noir·e·s[1], les Latinos ou les Chicanos (Landson-Billings, et al., 2016). En 1980, en contestation du cours de droit de la Harvard Law, des étudiant·e·s soulignerons la nécessité d’analyser le droit américain comme producteur de domination et hiérarchisation des « races » (Bentouhami, 2009, p. 3).[6] En 1989, plusieurs publications et assemblées convergent autours des dénonciations de la TCR qui s’affirme comme un véritable mouvement épistémologique et militant (Landson-Billings, et al., 2016).
Les découvertes de la TCR sur le champ éducatif sont nodales. Une premiere publication remarquable est « Vers une théorie raciale critique de l’éducation » (1955), écrite par Gloria Landson-Billings et William Tate. Les auteur·rice·s incitent à une lecture de la « race », en intersection avec la propriété comme outil pour comprendre les inégalités[7] scolaires et sociales.
Pour expliquer le rapport entre « race », éducation et propriété, les auteur·e·s de la TCR démontrent comment la question de la « race » est socialement et historiquement ancrée dans la vie quotidienne et institutionnelle de la société américaine. Cet ancrage débute à l’époque des Lumières et est théorisée au XIXe siècle par Carter G. Woodson et W.E.B. Du Bois, qui écrit « le problème du 20e siècle est le problème de la différence des couleurs » (cité par Landson-Billings & Tate, 1955, p.51). Comme a démontré également Derrick Bell, à partir du XVIe siècle, la société américaine s’est construite dans l’unique but de régulariser et protéger la propriété, en particulier celle sur la traite des esclaves. Autrement dit, selon Crenshaw, Gotanda, Peller & Thomas (1955), la relation entre l’histoire de l’esclavage, la racialisation et la propriété, nait dans une vision qui fait de la « blanchité »[8] une forme de propriété traditionnelle : c’est-à-dire que si une personne est blanche, elle est considérée comme libre, et si elle est Noire, elle est un·e esclave donc une propriété de la personne blanche (Crenshaw, et al., 1955). Ainsi, la « race » ne peut ni être réduite à un préjugé ni rendue « naturelle ». Elle fait partie des structures sociales (institutions, lois, relations, écoles, etc.) qui structurent un « Etat racial » (Bentouhami, 2009, p.7). Le travail de Bell, et des autres pionnier·e·s du mouvement (Delgrado, Crenshaw, Matsuda, Williams, Harris, Taylor,…), se présente ainsi comme une fervente critique du libéralisme (Lynn et al., 2013), car le discours raciste-libéral se fonde sur des idéaux « color blind » (vision neutre et aveugle vis-à-vis de la couleur), de méritocratie et des « normes raciales officielles », qu’on retrouve également au sein du monde scolaire (Caldwell,1996). En réponse, le but de TCR a été celui de présenter « un programme scolaire qui attaque le système qui rend impuissantes les personnes racisées » (Landson-Billings, et al., 2016, p. 35).
Approches pédagogiques de la TCR
Dans ses approches pédagogiques, la TCR prône la méthode du récit, c’est-à-dire la prise en compte du récit des personnes racisées : comment telle étudiante vit son expérience scolaire ? Pourquoi celui-ci a été deux fois plus exclu des programmes, que les autres étudiant·e·s blanc·he·s? Comment iel raconte son expérience avec les professeur·e·s blanc·e·s et non-blanc·he·s ? La TCR révèle l’importance de mettre en lumière ces narrations qui ont été cachées et passées sous-silence (Lynn, et al., 2013). Recueillir les récits des personnes racisées, se présente alors comme une méthode clé pour analyser les relations entre « race » et éducation (Landson-Billings, et al., 2016). Pour Zeus Leonardo, il est également important de travailler avec les élèves blancs sur leur condition de privilégiés (Landson-Billings, et al., 2016). Leonardo (2013) explique qu’une société raciale définit les enfants blancs comme les « sujets qui peuvent apprendre » et pose les enfants racisés en dehors des paradigmes d’apprentissage. L’objectif de la TCR est donc de nommer un racisme réel et vécu par les étudiant·e·s au quotidien (Landson-Billings & Tate, 1955). Landson-Billings et Tate (1995) décrivent une pédagogie culturelle, c’est-à-dire une pédagogie qui s’intéresse à l’émancipation collective (et non individuel) de toute forme d’oppression des étudiant·e·s à l’école.
In fine, il est important de souligner qu’à partir de cette lecture politique et structurelle de la « race », la TCR a permis de conceptualiser la notion d’intersectionnalité (Crenshaw, 1989). Ce concept désigne l’imbrication de multiples instances de domination telle que la « race », le « genre » et la « classe ». Toutefois, alors que nombreuses sont les études qui depuis les années 1970 analysent l’intersectionnalité, rares sont les études qui prennent en considération les rapports âgistes comme des rapports sociohistoriques de domination. Par domination âgiste on entend la domination des adultes sur les enfants, ou des enfants plus âgés sur les plus jeunes. À partir des théories de la TCR, Audre Lorde, bell hooks et Catherine Walsh, ainsi que d’autres pédagogues (Cannella & Viruru, 2004), nous invitent à construire une critique politique du « sujet éducable », en rajoutant ainsi à l’intersectionnalité la problématique âgiste, produite et reproduite au sein des écoles. Elles nous invitent à penser un modèle épistémique et pédagogique qui pose l’éducation et le savoir au centre d’une pratique de libération des multiples oppressions.
L’éducation comme pratique de libération : portrait de trois femmes pédagogues
Pendant la ségrégation raciale aux Etats-Unis, Audre Lorde[9] pense que l’école devient le lieu d’expression du racisme dans l’accès au savoir (Hedjerassi, 2017). À partir de ses expériences, Lorde voit l’éducation comme un moyen de libération et d’émancipation des oppressions multiples, où « c’est l’éducation, en particulier l’enseignement auprès des populations noires, qui s’imposera à elle comme un moyen précieux pour amener à la conscience du système imbriqué d’oppressions, pour le penser et agir contre lui » (Hedjerassi, 2017, p.126).
Plus précisément, dans les années 1990, Bell Hooks[10] théorisera la rencontre entre une pédagogie anticoloniale, critique et féministe. Hooks conceptualise un nouveau paradigme qui prend en considération les multiples oppressions et leurs intersections (genre, race, classe, âge), et qui implique non seulement des changements structurels, politiques et économiques, mais aussi épistémiques, c’est-à-dire dans la manière de concevoir les savoirs, les sciences, ainsi que l’enseignement et l’éducation. En effet, pour l’autrice, « l’éducation est une question politique pour les personnes exploitées et opprimées » (cité par Hedjerassi, 2016, p.2). Au travers d’une pédagogie de l’ « émancipation »[11], Hooks pose au centre de son analyse la pratique de la liberté de tout·e·s, et en particulier celle de la communauté africaine-américaine.
C’est finalement dans les années 2000 que Catherine Walsh[12] explique comment la décolonialité, c’est-à-dire la mise en lumière des « luttes contre la colonialité à partir des personnes, de leurs pratiques sociales épistémiques et politiques » (de Oliveira & Candau, 2010, p.26), peut s’exprimer et agir par des processus éducatifs et interculturels. Pour Walsh, il s’agit ainsi de penser une pédagogie décoloniale et antiraciste qui vient déconstruire une vision européenne prédominante d’enseigner et de hiérarchiser les sciences, et qui maintient les relations raciales. Walsh (2001) dénonce les politiques publiques éducatives de l’Amérique Latine, qui proposent plutôt une infiltration de la culture européenne au sein des programmes scolaires et des méthodes pédagogiques des écoles des pays du Sud. De cette manière, l’hégémonie européenne perdure et l’interculturalité est occidentalisée (de Oliveira & Candau, 2010). Comme dénonce Stuart Hall, le fait d’être instruit sur des contenus éducatifs coloniaux (ex. les études des grandes œuvres littéraires occidentales ou l’étude de la « découverte » des Amériques), impacte les identités des individus et fait perdurer les relations raciales (Apple, 2015).
À l’heure actuelle, en Belgique, la situation n’est pas différente : la colonisation belge et l’entreprise de Léopold II sont encore à interroger tant dans l’espace publique (avec notamment la question des statues), que dans les programmes d’histoire proposés par la Communauté française. Il s’agit alors de diagnostiquer l’historicité des rapports de domination dont nous sommes héritier·ère·s et que nous reproduisons parfois inconsciemment au sein des institutions et de l’école. Dans cet article, nous avons ainsi tenté de cartographier brièvement les études qui conscientisent la question de la « race »[13] , son articulation avec l’éducation, ses ancrages sociohistoriques et ses résistances pédagogiques.
Conclusion
À l’instar des théories postcoloniales et de la TCR, nous pouvons théoriser une pédagogie critique et décoloniale de l’émancipation, qui nous permet ainsi: (1) d’examiner le dialogue manquant sur la « race » dans les programmes de formation des enseignant·e·s et les salles de classe; (2) d’analyser nos propres expériences éducatives et comment ces expériences influencent nos approches de l’enseignement ; (3) de se demander comment et pourquoi les enseignant·e·s blanc·he·s réagissent comme iels réagissent aux discussions sur la « race » et le racisme; (4) d’exposer les structures sociales qui soutiennent les réponses des enseignant·e·s en formation à nos pratiques en classe; et (5) d’expliquer pourquoi il est important de parler de « race » et de racisme dans la prestation et les résultats de l’éducation (Williams & Evans-Winters, 2005, p.205, trad. perso).
Pour ce faire, plusieurs actions pédagogiques peuvent être pensées[14], mais comme nous l’enseignent Lorde, hooks et Walsh, la pédagogie décoloniale ou la décolonisation de la pédagogie n’est pas seulement « stratégie » ou « méthode » : elle est aussi action sociale, développement d’un langage critique et compréhension des systèmes transnationaux d’oppression des personnes racisées (Pereira, 2016).
Bibliographie
- Apple, M. (2015). « Understanding and interrupting hegemonic projects in education: learning from Stuart Hall ». Discourse: Studies in the Cultural Politics of Education, Vol. 36 (2), pp. 171-184, DOI: 10.1080/01596306.2015.1013245
- Bentouhami, H. (2009). Théorie Critique de la Race ou comment la « race » compte. Collect. 16 (09).
- Bruschi, F. (2018). Education et décolonisation de la pensée. ARC-Action et recherche culturelles ASBL. Analyse n°7.
- Bruschi, F. (2019). Racist subjectivation, capitalism and colonialism : decolonizing thought beyond education. Symposium, vol.23, no.1.
- Cannella, G. S., & Viruru, R. (2004). Childhood and postcolonization: Power, education, and contemporary practice. Routledge, Londres.
- Caldwell, V. F. (1996). Critical race theory: The key writings that formed the movement. edited by kimberle williams crenshaw et al. Columbia Law Review, 96(5), 1363-1374.
- Césaire, A. (1955). Discours sur le colonialisme. Suivi de Discours sur la Négritude. Paris : Présence Africaine.
- Chambre des représentants de Belgique (2021). Commission spéciale chargée d’examiner l’état indépendant du Congo et le passé colonial de la Belgique au Congo, au Rwanda et Burundi, ses conséquences et les suites qu’il convient d’y réserver. Rapport des experts, 26 octobre 2021.
- Crenshaw, Gotanda, Peller & Thomas (1955). Critical Race Theory. The key writings. That formed the Mouvement. New York : The New Press.
- Curcio, A. (2019). Introduction aux feminismes. Roma : DeriveApprodi.
- Dorlin (2005). De l’usage épistémologique et politique des catégories de « sexe » et de « race » dans les études sur le genre. Cahiers du Genre, n°39, pp. 83-105.
- Hedjerassi, N.(2017/1). Audre Lorde, L’outsider. Une poétesse et intellectuelle féministe africaine-américaine. « Travail, genre et sociétés », n°37, pp. 111-127.
- Hedjerassi, N. (2016). À l’école de bell hooks : une pédagogie engagée de la libération. Recherches & éducations, p. 39-50. Disponible sur : https://doi.org/10.4000/rechercheseducations.2498
- Landson-Billings, G. & Tate, W. (1955). Toward a Critical Race Theory of Education. Teachers College Record. Vol.97, No.1.
- Landson-Billings, G., Gillborn, D. & Taylor, E. (2016). Foundations of Critical Race Theory in Education. New York : Routledge.
- Leonardo, Z. (2013). The story of schooling : critical race theory and the educational racial contract. Routledge. Vol.34, No.’, pp.599-610. http://dx.doi.org/10.1080/01596306.2013.822624
- Lynn, M., Jennings, M. E. & Hughes, S. (2013). Critical race pedagogy 2.0: lessons from Derrick Bell, Race Ethnicity and Education. Routledge, 16:4, 603-628, DOI: 10.1080/13613324.2013.817776
- Mbembe, A., Mongin, O., Lempereur, N., & Schlegel, J. (2006). « Qu’est-ce que la pensée postcoloniale ? Entretien avec Achille Mbembe ». Esprit (Paris. 1932), Décembre (12), 117-133. https://doi.org/10.3917/espri.0612.0117
- de Oliveira, F.-L. & Candau, V. (2010) « Pedagogia decolonial e educação antirracista e intercultural no Brasil ». Educ. rev., Vol.26 no.1.
- Pereira, I. (2016). La pédagogie révolutionnaire décoloniale. Questions de classe(s). Disponible sur : http://www.questionsdeclasses.org/./?La-pedagogie-revolutionnaire- decoloniale
- Walsh, C. (2001). La éducation interculturelle dans l’Education. Peru: Ministerio de Educación. (document de travail).
- Williams, D.G. & Evans-Winters, V.(2005). The Burden of Teaching Teachers : Memoirs of Race Discourse in Teacher Education. The Urban Review, Vol.37, No.3, pp. 201-219.
[1] Les relations raciales sont des relations de rapports de domination, c’est-à-dire de rapports de force. Or, les relations ethniques sont des relations d’affirmation identitaire. C’est-à-dire que dans les relations ethniques, l’individu va marquer l’appartenance à un certain groupe ethnique.
[2] Selon Elsa Dorlin, l’éducation s’inscrit dans une domination qui se veut épistémique et construite à partir de la catégorie de « race ». Dorlin, en citant Fanon, parle plutôt de « racialisation » d’un « monde historiquement déformé » où les dominé·e·s sont enfermé·e·s (Dorlin, 2005, p.96).
[3] La colonialité se caractérise comme « la configuration et l’articulation du pouvoir, du savoir et de l’être qui, suscité par la colonisation et l’entretenant, informe encore aujourd’hui les structures sociales » (Bruschi, 2018, p. 7).
[4] Le titre original du mouvement en anglais est Critical Race Theory (CRT)
[5] La CRT suit ainsi la vague des mouvements civiques et des études critiques sur les lois américaines (CLS).
[6] Les étudiant·e·s de droit de la Harvard Law, dont Kimberlé Crenshaw, protestaient pour que le cours de droit soit donné également par des professeur·e·s Noir·e·s. Après plusieurs refus de la part de la faculté, le groupe organise un cours alternatif basé sous l’ouvrage « Race et Racisme dans la Loi Américaine » (1973), écrit par le professeur de droit Derrick Bell, qui proposait un regard critique sur les lois américaines plus protectionnistes de la suprématie blanche.
[7] N.d.t. : en français peut être traduit à la fois par “inégalité”, “iniquité”, “injustice”.
[8] Pour David Gillborn, la « blanchité» se réfère à la racialisation/le discours sur la race, alors que « personne blanche » est la construction catégorielle de l’identité sociale blanche (Landson-Billings, et al., 2016).
[9] Audre Geraldine Lorde (1934-1992) est une poétesse américaine, militante féministe du mouvement des droits civiques des africain·e·s américain·e·s.
[10] Née Gloria Watkings, elle se nomme bell hooks en hommage à sa grand mère. Pionnière du mouvement du féminisme Noir aux années 1980-1990, bell hooks est née en 1952 et grandit dans le Sud des Etats-Unis, où elle vit pleinement la période des lois Jim Crow. Elle subit un ségrégationnisme qu’elle rencontre particulièrement à l’école (Hedjerassi, 2016).
[11] Hooks « construit sa réflexion et sa pratique éducative autour d’une pédagogie de la transgression, définie comme résistance aux frontières de classe, race et sexe en vue de la transformation et la libération, une pédagogie de l’espoir par la promotion d’une communauté (d’apprentissage), et enfin une pédagogie de la pensée critique pour atteindre à la sagesse pratique. Si elle voit la salle de classe comme le site possible des transformations radicales, son projet est de toucher une “audience inclusive”. (…) L’enjeu n’est rien moins que de (re)donner à toutes et tous, en particulier aux sujets historiquement opprimé-e-s, de l’agentivité et du pouvoir d’agir » (Hedjerassi, 2016, p. 9).
[12] Catherie Walsh est une intellectuelle contemporaine qui a travaillé près de Paulo Freire aux Etats-Unis et les dernières années en Equateur, dans l’accompagnement des mouvements indigènes et afrodescendents.
[13] N.B. : dans cet article nous posons un focus sur la question de la « race », mais n’oublions pas l’intersection des multiples instances de domination.
[14] Selon Sebastjan Leban et Peter McLaren, pour décoloniser l’école on peut concrètement agir au travers : « la réduction de la taille des classes, la réduction de l’impact environnemental des établissements scolaires, d’en finir avec le système de division des élèves en groupes par niveau d’aptitude, la création d’écoles à échelle humaine dans les communautés ou aussi proches que possible, la coopération entre les écoles et les autorités locales pour redistribuer les ressources et participer au développement des politiques et des pratiques antiracistes, antisexistes et anti-homophobes, et les politiques égalitaires destinées à aider à atteindre des résultats éducatifs plus égalitaires, indépendamment de la classe sociale, du genre, de la race, de l’orientation sexuelle ou de la situation de handicap, et un plan d’étude orienté vers la coopération socialiste et la justice écologique » (cité par Pereira, 2016, p. 2).