Une police surmenée et une confiance en « l’institution » ébranlée
Dans le 33ème cahier du Comité P portant sur les « décisions judiciaires concernant les membres du personnel de police », on apprends qu’en 2017, 167 agent.e.s de la police (fédérale et locale) ont étés poursuivi.e.s en justice. La majorité des agent.e.s concerné.e.s sont bruxellois.e.s., 85 d’entre elles/eux ont été.e.s acquitté.e.s et 77 condamné.e.s. Les faits reprochés comprennent « arrestation arbitraire et illégale », « faux » (imitation d’une signature sur un PV), « détournement », un inspecteur était poursuivi pour des « faits de violences à l’encontre d’ex-compagnes », « détention d’images pédopornographiques » entre autres. Parmi les pratiques les plus décriées par les citoyen.ne.s on distingue la pratique du profilage ethnique.
Les syndicats de police tirent la sonnette d’alarme en expliquant que les policier.ère.s sont surmené.e.s et font face à une surcharge de travail plus importante que les moyens qui sont à leur disposition pour la traiter efficacement. Dans un appel au futur gouvernement, le syndicat de police SLFP, s’inquiète de la baisse du nombre de candidat.e.s policier.ère.s et rappel à la prochaine formation politique l’importance de « mettre en place un cadre satisfaisant de protection juridique et psychosociale » pour la profession.
Bien que la lecture et l’analyse des problèmes puissent diverger entre les syndicats et certaines associations, tous comprennent l’urgence de la situation aussi bien pour les policier.ère.s que les citoyen.ne.s, d’autant plus qu’il s’agit d’une fonction coercitive.
Une justice fatiguée, des recours qui se multiplient et des autorités publiques sourdes
Le 22 mai 2019, une coalition de syndicats, associations de terrain et association de magistrat.e.s publiaient une carte blanche pour dénoncer la hausse du nombre de recours pour non-respect des droits fondamentaux et le dialogue très difficile avec l’état. Elles et ils expliquent constater une rupture dans le dialogue avec les autorités publiques et un glissement « de société dangereux ». On apprend que les recours constitutionnels se multiple car le travail de plaidoyer n’est pas entendu : « quand la dignité humaine, le droit de manifester, la liberté d’expression, le respect de la vie privée, l’égalité entre personnes… sont en danger, l’enjeu de loin un simple conflit d’intérêts ou une simple divergence d’opinions politiques. Ce qui est alors contesté c’est une certaine action des autorités qui entrave la capacité des personnes à mener une vie digne ».
Face à ces situations urgentes, que proposent les partis dans leur programme ?
Maintenant que le cadre général est succinctement posé, intéressons-nous plus précisément à l’analyse des programmes des partis sur certaines pratiques policières (profilage ethnique, diversité des fonctionnaires, etc.) et aux dispositions juridiques existantes pour lutter contre le racisme et les discriminations.
DéFI et le PTB établissent des liens plus clairs entre racisme et ces deux institutions et proposent un nombre de mesures concrètes, une quinzaine pour le premier. Parmi celles-ci on retrouve l’interdiction formelle du profilage ethnique, introduire le récépissé à distribuer aux personnes contrôlé (une mesure qui permets, notamment, d’objectiver le profilage ethnique), « la mise en place d’enquêtes impartiales sur tous les cas d’usage excessif de la force, y compris lorsque de tels actes sont motivés par le racisme » (DéFI), soutien « des cellules Diversité au sein de la police » et y rendre « obligatoire une formation complémentaire sur la lutte contre le racisme » (PTB), « Développer des peines alternatives en cas d’infractions aux lois sur le racisme et la xénophobie » (DéFI), et d’autres encore.
ECOLO propose « l’organisation de tests de situation, par la formation des services de prévention et de police amenés à accueillir les plaignants » afin de « garantir l’effectivité des lois anti-discrimination ». S’agissant de la prévention, le parti de Zakia Khattabi poursuit en voulant « renforcer la police de proximité pour assurer une meilleure politique de prévention ».
Le MR n’établit pas les liens entre racisme, justice et police dans son programme, mais propose un nombre important de mesures pour lutter contre les discriminations spécifiques faites aux femmes notamment en améliorant « la formation des magistrats et la coordination entre le parquet et les intervenants (police, maison de justices, institutions et services publics, associations, etc.) ».
Le Parti Socialiste propose de « faire de la lutte contre les discriminations (sexisme, racisme, xénophobie, antisémitisme, islamophobie, etc.) » une priorité de la politique criminelle des parquets.
Plusieurs autres partis font des liens directes et mesurables entre des pratiques policières et judiciaires et des discriminations spécifiques envers les personnes des communautés LGBTQI+ et les femmes, par exemple, mais pas nécessairement entre la lutte contre le racisme et le soutien de cette lutte au sein de la police et des autorités juridiques. D’autres encore appellent à réviser des articles de loi ou évaluer les lois anti-discriminations mais sans apporter de mesures concrètes. C’est pour cela que ces programmes sont évalués comme incomplets (+/-) dans notre tableau.