Foulard ou pas foulard dans les institutions publics ? Ecolo surprend, le MR reste ferme

Rédigé le 22 mai 2019

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Cette question revient régulièrement sur le devant de la scène médiatique, soit en période électorale ou à la rentrée scolaire. Elle s’inscrit dans un débat plus large sur le port de signes convictionnels pour les fonctionnaires et les élèves. En théorie, elle s’adresse donc aux personnes souhaitant exercer leur liberté religieuse mais dans la pratique c’est généralement le port du foulard qui est remis en question, voir stigmatisé. Comment se positionnent les partis politiques francophones ? Analyse de leur programme.

De l’interdiction générale à la « neutralité inclusive » ?

Depuis 2 ans, une coalition d’organisations francophones et néerlandophones luttant contre le racisme et les discriminations travaillent afin de mettre sur l’agenda politique un plan d’action national de lutte contre le racisme. Le fruit de ce travail est la production d’un texte contenant 11 mesures claires, mesurables et prioritaires dans la lutte contre le racisme qui ont été présentées à la quasi-totalité des partis politiques en Belgique (nous reviendrons là-dessus en fin de semaine).

Parmi les propositions, l’introduction de la « neutralité inclusive » pour les employé.e.s de la fonction publique. Un principe qui se fonde sur l’impératif de la neutralité dans le service rendu aux bénéficiaires d’une institution publique. Dans les faits, il s’agit de passer à une interdiction « a priori » de tous les signes convictionnels à une interdiction « a posteriori ». C’est-à-dire, interdire le port de signe convictionnel une fois qu’une infraction a été constatée sur la manière dont la ou le fonctionnaire a traité un dossier et si un lien avec ses convictions a été établi. En effet, ce changement de curseur permet l’inclusion de toutes les personnes souhaitant exercer une fonction publique, et élimine leur exclusion de fait ou la demande de choisir entre la pratique religieuse et le travail.

Il est difficile aujourd’hui de défendre que la simple apparence de neutralité garantirait un service juste tout comme il est réducteur de soutenir qu’une appartenance politique ou religieuse réelle ou supposée altérerait d’emblée l’égalité de traitement due aux citoyen.ne.s. Cela peut parfois s’apparenter à de la discrimination indirecte puisque dans le processus de recrutement, les personnes sikhs portant un turban ou musulmanes portant un foulard sont écartées de la possibilité d’exercer ces fonctions sur base de la vision actuelle partagée de la neutralité.

Par ailleurs, dans son rapport d’activités 2017, UNIA rappelle que « le pouvoir public qui voudrait restreindre la liberté de manifester ses convictions religieuses doit avancer de solides arguments tels que la protection de l’intérêt général, la protection des droits d’autrui, la sécurité, etc. » puisque « la liberté religieuse porte à la fois sur les convictions individuelles mais aussi sur l’expression de ces convictions, notamment à travers le port d’un signe ou d’un vêtement convictionnel. Cette liberté n’est pas absolue mais les restrictions doivent poursuivre un objectif légitime et les moyens mis en œuvre doivent être nécessaires et adéquats. » (UNIA, 2017).

Comment se positionne les partis sur le port de signes convictionnels à l’école et dans la fonction publique ?

Une droite à l’unisson : l’interdiction

Seuls 3 partis affichent très clairement leur positionnement sur la question. D’un côté du spectre, le PTB prône « l’abrogation de l’interdiction du port du foulard dans les entreprises privées et les services publics ainsi que dans les écoles ». Il n’est pas fait mention des autres signes convictionnels. De l’autre côté du spectre, le MR et DéFI se prononcent à l’unisson contre le port de signe distinctifs et pour l’inscription de la laïcité dans la constitution belge. Pour DéFI « la neutralité ne suffit pas pour autoriser les pouvoirs publics à prendre des mesures face à certaines situations problématiques » avant de citer « l’affaire Actiris » (l’autorisation, pour les fonctionnaires qui le souhaitent, d’exercer une pratique religieuse) comme exemple problématique. Pour DéFI seule la laïcité permettrait de « réglementer le port du voile à l’école et dans les services publics ». Le MR est plus limpide et souhaite « l’interdiction du port de tout signe convictionnel ».

Ni chaud, ni froid, ni tiède : le PS et le cdH évite de se positionner

A l’instar du MR et de DéFI, le PS souhaite voir la laïcité inscrite dans la constitution belge. Dans son programme, il est simplement mentionné que les fonctionnaires doivent « assurer la neutralité, l’équité et l’impartialité totales ». Mais le ton se durcit pour exiger la suppression « de tout signe convictionnel ostentatoire traduisant une conception religieuse ou philosophique sur les murs des bâtiments publics, comme les cours et tribunaux, les maisons communales ou encore les hôpitaux publics ». Il semble donc plus facile de réguler les murs que les pratiques, ce qui revient donc au maintien du statu quo actuel.

Le programme du cdH ne fait simplement pas mention de quelconque mesure en lien avec cette question.

ECOLO surprend par l’absence de mesures

Actuellement perçu comme le parti le plus progressiste sur des mesures liées à la justice climatique et sociale, et avec 22.9% d’intention de vote à Bruxelles (Grand Baromètre, Le Soir), ECOLO a rendu public un programme avec très peu de mesures pour lutter contre le racisme en général, et aucune mention sur le port de signe convictionnel. Un positionnement qui a de quoi étonner au vu de certaines sorties médiatiques remarquées de certain.e.s candidat.e.s.

Rendez-vous demain pour discuter des propositions des partis sur les discriminations dans l'accès à l'emploi.

Afin de réaliser cette analyse, nous nous sommes basés sur les programmes publics de chaque parti francophone et disponibles sur leur site internet et présentés comme « complet ». Les discours, tracts, notes internes et positions particulières des candidat.e.s n’ont pas été analysés. En effet, la formation des nouveaux gouvernements se fera sur base des propositions et des priorités pour lesquelles les partis sont en campagne actuellement, c’est pour cela que nous nous intéressons à leur programme public uniquement.
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